Jean et Jeanne
On est jamais là par hasard. Et si nous sommes tous, êtres humains, les descendants de petits paysans pauvres, lorsque l’on nait en Catalogne ou en Languedoc, près de la Méditerranée, la paysannerie c’est d’abord la viticulture. Car la vigne aussi est née et a grandi ici sur ces terres pauvres cuites par le soleil et les vents. Alors la petite histoire rejoint la grande. L’Ancienne Mercerie, c’était vraiment une mercerie tenue par Jeanne la grand-mère de François, également couturière talentueuse. C’était aussi Jean le grand-père, viticulteur qui ne buvait jamais de vin. Ils étaient venus en 1947 de l’Aveyron tout proche s’installer à Autignac pour y cultiver la vigne et produire du vin de table, puisque c’était à l’époque le seul débouché possible pour les vins régionaux. Du côté maternel, encore une famille viticole dans le Gard cette fois, de la vigne, mais aussi des melons, des asperges et des cerises, car les terres y sont plus fertiles que sur les coteaux Héraultais. D’ailleurs à Autignac toutes les terres ne valent pas, et Jean et Jeanne achetèrent la maison avec quelques vignes situées au nord du village. Mais à l’époque Faugères n’était que le nom d’un village déjà connu pour la qualité de ses vins et de son eau de vie. Ces terres, aujourd’hui classées en AOP Faugères, produisaient peu de raisins 3 ou 4 fois moins que les terres situées au sud d’Autignac. Le vin étant considéré et payé de la même manière par le négoce, Jean passa toute sa vie à tenter d’acheter de bonnes parcelles. Il y parvint. A sa mort en 1986, elles furent vendues. Les terres tout juste classées en appellation Faugères ne trouvèrent pas preneur. Et en 2000, comme une boucle, l’histoire recommença.
Les petits vins du Midi, devenus grands vins du Languedoc
Contrairement à une idée reçue, ce n’est pas le manque d’exigence qui expliquait la piètre qualité des vins du Midi de la France pendant près d’un siècle, mais l’existence d’un marché de vin dit de table ou de consommation courante. On buvait du vin comme de l’eau, à la place de l’eau parfois, à tous les âges, en toutes circonstances. Les volumes requis étaient très importants et les terres méridionales exceptionnellement adaptées à la culture de la vigne. Ce vin de table était produit partout en France et celui du sud n’était sans doute pas le plus mauvais. Pour produire des vins fins, à notoriété, il fallait avoir accès à certains marchés de luxe souvent internationaux, ce qui n’était pas le cas ici. Ce marché des vins de table est aujourd’hui heureusement tari, et une révolution a opéré. Il s’agit toujours de raisin fermenté donc de vin, mais presque tout est différent, : les cépages et en cave les méthodes de vinification et d’élevage. Sur les terres fertiles sont produits aujourd’hui des vins en IGP (les ex Vins de Pays), et sur les coteaux ont été délimité les Appellations d’Origines, Crus du Languedoc, capables de produire (et de vendre) de très grands vins.
Nous vendangeons toujours le raisin dans les mêmes comportes, avec la même brouette…Le camion n’est plus en service.